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Chronique Man on the Rocks (par Johnny Sharp - Prog Magazine)


 « Ne jamais dire ‘jamais plus’. Heureusement, Mike Oldfield a reçu ce fameux dicton lorsque, de son propre aveu, il pensait en finir avec cette histoire de faire de la musique après son dernier travail studio, l’album classique de 2008 bien reçu par la critique, Music of the Spheres.

Il déclare avoir été revitalisé par son implication à la cérémonie d’ouverture des JO 2012 de Londres, et à en juger même par la déviation qu’a été
[Music of the] Spheres, le changement s’est avéré plus bénéfique que tout le reste pour un homme qui maintenant sort son 25ème album studio.

Mais peu de fans auront attendu
Man on the Rocks, son album de chansons le plus assumé au niveau de son aspect commercial et accessible depuis Heaven’s Open de 1991. Cet album qui fut, comme par hasard, son dernier album chez Virgin, concluant ainsi un accord qui avait autant tourné au vinaigre que l’album est tombé dans l’oubli, vous pouviez entendre Oldfield crier ‘Fuck off’.

A l’époque, la maison de disque faisait pression pour qu’il sorte des hits. Désormais, récemment de retour chez Virgin, qui fait partie de EMI, on dirait qu’il n’est que trop ravi de pouvoir se faire plaisir sans leur incitation.

Le morceau d’ouverture,
Sailing, donne le ton, une déclaration optimiste, parfois euphorique d’intention qui jure ‘Cast the lines away, it’s a fine bright day, and the wind is blowing our way’ [‘Casse les lignes de suite, c’est une belle journée lumineuse, et le vent nous souffle notre voie’], comme si notre héro s’était libéré du carcan d’être attendu comme chanteur à texte et était déterminé à juste se laisser aller. Cette production qui fait écho, évoque les souvenirs de sa période la plus pop – pensez à Moonlight Shadow et vous serez à peu près dans le même panier.

Les fans plus aventureux de Oldfield pourraient considérer cet album comme étant l’antithèse créative de ses fastes années 70, mais l’approche simple semble avoir revigoré son écriture. Parce que même si les grandes lignes de
Sailing et ses chants en chœur peuvent être écœurants pour certains, il n’y a pas de doute que c’est un hit qui devrait arriver.

Moonshine s’inscrit dans la même veine hymnique et balayée par le vent, cette fois décoré par une teinte d’instrumentalisation celtique, de celles qui ont ponctuées plusieurs morceaux de l’ancien répertoire de Oldfield. Il y a même quelques coups de guitare au son de cornemuse qui lui sont également caractéristiques.

C’est à ce moment que nous devons présenter l’homme qui est, assez curieusement, le premier à prêter sa voix sur chaque chanson de l’album de Mike Oldfield (en dehors de ce dernier lui-même). Cette tâche incombe au jeune Luke Spiller, jusqu’ici mieux connu comme étant le chanteur hirsute du groupe démarrant dans le glam-rock, The Struts. C’est un choix audacieux, mais il est payant. Le style mélodramatique et un peu théâtral du garçon ajoute de la couleur qui est la bienvenue. Sur les réalisation avec son propre groupe, il a des moments à la Freddy Mercury plus flagrants dans la voix de Spiller, mais sur cet album, il offre une impressionnante gamme de personnages en complément.

Sa polyvalence est bien mise en évidence sur le morceau-titre, où les paroles d’ouverture contemplatives en acoustique se construisent en un crescendo allant gratter le ciel, avec Spiller hurlant tandis que le mur de guitares de Oldfield et les chœurs, dans un style gospel, élèvent le tout en un genre de rock pour stadium.

Castaway est une autre ballade à combustion lente pour se transformer en hymne, avec quelques bonnes envolées de guitare par l’homme qui en a la charge, et si la formule commence à devenir un peu répétitive, l’intrigue s’épaissit plus tard.

Chariots en a plus dans le ventre, construit autour d’un riff de guitare martelant, tandis que Spiller chante ‘Put an end to this tyranny ‘cos we are fighting to be free’ [Mettez fin à cette tyrannie parce que nous nous battons pour être libres ». Quelle est cette tyrannie ? La pression de la célébrité ? La fiscalité ? (Peu probable maintenant que Oldfield vit aux Bahamas). L’interdiction de fumer, pour laquelle nous avons entendu Oldfield râler il y a quelques années ? Qui sait. Mais les sentiments sont plutôt flous, la musique continue de marteler, même à l’autre bout du spectre sonore, alors que Following the Angels est presque une rêverie au piano comme une berceuse qui nous charme avec un total changement de rythme.

Telle est l'accessibilité instantanée et le style variété de cet album, vous vous demandez même s'il à sa place dans un magazine dédié à la musique progressive. Au sens général, ce n’est pas un album de prog, mais plutôt du point de vue évolutif dans la création et dans le choix de ne pas se répéter en tant qu’artiste, peut-être par défi de faire un recueil de  chansons rock, commerciales et faites pour Radio 2, étant donné que c’est le plus grand écart que Mike Oldfield ait pu faire. Et finalement, ce qui compte vraiment, c’est qu’il l’a fait aussi bien que tout ce qu’il a pu faire ces 30 dernière années. »

Johnny Sharp (pour Prog Magazine)

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